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Version du 19:43, 10 août 2008

Dépouiller le phénomène des OVNI de sa gangue irrationnelle

André Lebeau, ancien président du Centre national d'études spatiales

Il n'est pas bien porté, dans certains milieux scientifiques, de se préoccuper de phénomènes dont on juge qu'ils appartiennent à la mythologie populaire ou, qu'en tout cas, ils sont étrangers à la science.

Ainsi des pierres tombées du ciel, longtemps considérées dans notre pays comme relevant de la fable.

Pourtant, le jour où une grêle de météorites sur la ville de Laigle permit une observation collective et indiscutable, elles entrèrent dans le champ de la science. Un siècle plus tard, hâtivement, en témoins de l'existence d'une vie primitive sur Mars.

Les phénomènes de cette nature posent à l'approche scientifique un problème préalable : existe-t-il un fait scientifique ?

Lorsque le phénomène relève de l'expérimentation, le critère à mettre en oeuvre est simple ; c'est la reproductibilité de l'expérience qui est la pierre de touche et fournit le fait qu'il s'agit ensuite d'interpréter. Mais lorsque le phénomène est inaccessible à l'expérimentation, lorsque l'observation répétée est la seule ressource sur laquelle on puisse se fonder, comme c'est le cas en astronomie et dans la plus grande partie de la géophysique, la situation est plus difficile.

Cependant, lorsque le fait, même rare, possède une visibilité collective indiscutable, son accession au statut d'objet scientifique demeure aisée. Éclipses, comètes et novae sont reconnues dans leur existence depuis la plus haute Antiquité, même si leur interprétation a longtemps comporté – et comporte encore parfois – une dimension religieuse. L'observation collective et simultanée joue alors le même rôle que la reproductibilité de l'expérience.

Il en va autrement lorsque l'événement est non seulement rare mais discret et lorsque les témoins sont, à chaque occurrence, en nombre réduit, ce qui ouvre la porte à diverses suspicions. C'est à cette catégorie qu'appartiennent les objets volants non identifiés, les OVNI. On rencontre dans leur cas deux difficultés supplémentaires. D'abord celle que nombre d'activités humaines, et surtout depuis le début de l'ère spatiale, engendrent des phénomènes atmosphériques dont l'origine n'est pas immédiatement reconnaissable par ceux qui les observent. Les OVNI, dont l'origine ne peut être assignée ni à une source humaine, ni à un mécanisme naturel répertorié par la science, sont, en tout état de cause, mélangés à un bruit de fond dont l'origine, pour être difficile à identifier, n'a rien de mystérieux.

Par ailleurs et surtout, l'existence de manifestations inexpliquées, dans l'atmosphère et occasionnellement à la surface de la Terre, réveille inévitablement une interrogation fondamentale : sommes-nous seuls dans l'Univers ? Certains de ces phénomènes pourraient-ils être le fait d'êtres extraterrestres ? Cette interrogation donne à la question des OVNI une dimension sociologique, médiatique, voire religieuse, dans un espace qui n'est pas celui de la science et de ses méthodes. Et c'est l'existence même de cette dimension qui suscite dans la communauté scientifique des réactions de rejet.

Un examen dépassionné de la situation devrait pourtant conduire ceux qui croient en la valeur de la méthode scientifique à considérer que l'existence même d'un puissant environnement irrationnel est une raison supplémentaire d'appliquer les préceptes de cette méthode à la question des OVNI.

C'est cette aventure qu'a tentée COMETA dans le rapport qu'il présente, appuyé notamment sur les travaux conduits par le GEPAN, devenu plus tard le SEPRA. L'importance de la place accordée aux observations, aux témoignages et à l'analyse des cas élucidés montre le rôle capital que joue ici l'établissement des faits. Mais on trouvera également dans ce document une réflexion sur l'hypothèse d'une intelligence extraterrestre et sur l'importance qu'elle pour-a NASA les a érigées, sans douterait avoir si les travaux convergeaient vers sa confirmation. Ce rapport fait oeuvre utile en contribuant à dépouiller le phénomène des OVNI de sa gangue irrationnelle. La question de savoir si ceux qui l'ont préparé croient ou ne croient pas à l'existence de visiteurs extraterrestres, dissimulés dans une variété de phénomènes surprenants par l'apparence mais banals par leur cause, cette question, en définitive, est sans réelle importance. Ce que croit un scientifique est important dans la conduite de sa recherche parce que c'est cela qui le motive et qui l'anime. Mais sur le résultat de sa recherche, sa croyance n'a aucune importance et, s'il est rigoureux, aucun effet.

(Texte demandé par COMETA pour l'édition de 1999)

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